Traite humaine en France: "une réalité qui touche tous les milieux sociaux"Le gouvernement présentait ce mercredi un plan de lutte national contre l’exploitation des êtres humains. L'occasion de rappeler que la traite humaine et le travail forcé sont aussi une réalité en France. Le point sur la situation avec Sylvie O’Dy, présidente du Comité contre l’esclavage moderne. Le 14/05/2014 à 17:34
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Un salarié roumain à Saint-Nazaire, lors d'une manifestation en 2003 pour protester "contre l'esclavage moderne" (Franck Perry - AFP)
Avant
la mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (Miprof), créée en novembre 2012, aucun travail de la part des pouvois publics n'avait été engagé dans ce sens.
Pourtant, plus de 185 procès pour esclavage domestique se sont tenus depuis le début des années 2000. Et la France a même été condamnée deux fois par la Cour européenne des droits de l'Homme.
Comment repérer les formes d'esclavage moderne en France? Nous travaillons à partir d'un faisceau d'indices: comme l'interdiction de faire des allers et venues à l'extérieur du domicile, des conditions de travail allant de 12 à 15 heures par jour, des conditions de vie lamentables comme dormir par terre ou dans un cagibi, le droit à ne se laver qu'une fois par semaine, la profération de menaces à l'encontre de la victime etc.
Existe-t-il un profil des victimes?
Il y en a trois principalement. La plupart des victimes vient d'Afrique. De jeunes filles sont envoyées en France avec la promesse d'un accès à l'école, à l'éducation. Pour les plus âgées, on leur promet de régulariser leur situation, et de leur trouver un travail.
L'autre catégorie est issue d'Asie du Sud-Est. Souvent, ces femmes sont venues par le biais d'agences de placement asiatiques. Parfois après un passage au Proche-Orient, elles débarquent comme domestiques pour payer l'éducation de leurs enfants restés au pays.
Enfin, et plus surprenant, il existe bien un esclavage domestique franco-français. On le retrouve dans le milieu du bâtiment, de la construction, du monde rural ou encore de l'artisanat. Pour preuve, le 9 avril dernier, un petit patron d'entreprise a été condamné pour avoir exploité deux personnes âgées et handicapées mentales.
En d'autres termes, l'esclavage moderne est dans tous les milieux. Des beaux quartiers à ceux plus défavorisés... il n'est pas l'apanage des diplomates et des nababs.
L'esclavage en France, les grandes dates:
-1848: abolition de l'esclavage
-1994: création du Comité contre l'esclavage moderne
-2005 et 2012: la France condamnée par la Cour européenne des droits de l'Homme
-2012: mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains
- 2013: première loi qui introduit dans le Code pénal la réduction en esclavage, la servitude et le travail forcé Alors qu’un
plan de lutte national contre l’exploitation des êtres humains a été présenté mercredi matin en conseil des ministres, il apparaît, dans un rapport de l'Organisation internationale du travail (OIT), que quelque 270.000 personnes seraient victimes d'exploitation sexuelle ou de travail forcé dans les pays industrialisés.
Qu'en est-il en France?Etat des lieux avec Sylvie O’Dy, présidente du
Comité contre l’esclavage moderne (CCEM).
La traite humaine est un phénomène méconnu en France. Sait-on combien de personnes en sont victimes? Aussi étonnant que cela puisse paraître, il n'existe aucun chiffre officiel concernant l'esclavage moderne en France. Des estimations pour l'Europe sont faites, mais c'est tout.
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