Perché sur une échelle, le rabbin Solomon Schechter, enseignant au collège de théologie de l’université de Cambridge, contemple avec excitation les profondeurs d’un cagibi aveugle et puant. La scène se passe en 1896 dans la synagogue Ben Ezra de Fostat, dans le vieux Caire, et le cagibi, accessible uniquement par une trappe sous le toit, est sa genizah : la cache où sont jetés les écrits qui, citant le nom de Dieu, ne sauraient être simplement mis aux ordures. La synagogue a été construite en 1018, sa genizah est alimentée depuis près d’un millénaire. « Un champ de bataille de livres ! », écrira l’érudit de retour chez lui avec 150 000 manuscrits dans un état épouvantable qu’il passera sa vie à étudier et léguera à son université.