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Contes  - Page 3 EmptySujet: Contes Mar 12 Déc - 19:40Message n°1sur la page N°1

Rappel du premier message :

Comment sont nés la terre, les étoiles et les enfants du monde ?
Par Pestoune
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Voici ce que racontait le père du père de mon grand-père. Du temps d’avant le temps, bien avant la création de la terre, des étoiles et des enfants du monde, l’univers n’était qu’une énorme citrouille ! Une cucurbitacée, car c’est ainsi le nom que l’on donne à la citrouille, si volumineuse, si démesurée, si vaste, si massive que notre esprit ne pouvait en imaginer les contours.
A l’intérieur de cette cucurbitacée, joufflue et dorée come une brioche, il y avait, en haut, un ciel luminescent, en bas, un verger aux fruits délicieux et un jardin fleuri de légumes.
Pour s’occuper de ce jardin, ne vivait là, qu’un seul homme, un très vieil homme, grand comme une asperge, mince comme un haricot vert, les cheveux couleur carotte, des yeux noisette, un teint de navet avec sa peau ridée, fripée comme une vieille pomme.
De part son âge avancé, et grâce à ses particularités végétales, cet homme connaissait le langage, subtil, des fleurs, des fruits et des légumes. Au milieu de ce paradis, au cœur même de ce lieu de délices, il cultivait et faisait s’épanouir des citrouilles sacrées.
Le père du père de mon grand-père racontait que ces divins potirons contenaient tout le savoir et toute la sagesse du monde et qu’un jour, un monde nouveau naîtrait de leurs graines. Le vieil homme savait-il cela ? Le conte n’en dit rien.
Chaque automne, le vieux jardinier ramassait ses citrouilles, les fendait en deux, séparait la chair des graines et mettait celles-ci à sécher. Plus tard, il en sèmerait une partie et se nourrirait du restant. On raconte que c’est, peut-être, grâce à ces graines qu’il était immortel.
Un automne, la récolte des citrouilles fut si abondante et si généreuse que le vieil homme dut les entasser dans un recoin de l’énorme cucurbitacée. Quand il eut placé au sommet de la pile, la dernière citrouille, celle-ci perdit l’équilibre et chavira, fut entrainée à terre et se mit à rouler, rouler si loin qu’elle jaillit de la cucurbitacée, tomba dans le vide et resta suspendu, dans l’espace.
La terre venait de naître. Elle était si belle que le soleil se mit à danser, pivotant sur lui-même et tournoyait autour d’elle ; si belle que les vents accoururent de bout du monde, pour la caresser ; si belle que la lune, la nuit, l’éclaira afin que puissions l’admirer. Les années passaient et les saisons défilaient.
Un jour de printemps, alors que le vieil homme s’apprêtait à semer ses graines de citrouille, il tomba dans le chemin de terre boueux et glissant, qui menait au potager.
Sa corbeille se renversa et les graines qu’elle contenait s’envolèrent, emportées par le souffle du vent comme une nuée de criquets.
Elles se dispersèrent dans l’espace, aux quatre coins de l’univers. Les étoiles venaient de naître.
Et les enfants du monde, comment sont-ils nés ? A cela, le père du père de mon grand-père répondait que la terre était venue au monde, les étoiles s’éveillaient à la vie, il ne restait plus au temps qu’à s’écouler, à se dérouler et que l’amour ferait le reste.  Car c’est bien de l’amour que sont nés les enfants ?  Ainsi sont nés, la terre, les étoiles et les enfants du monde.
 
« de Henri Conteur professionnel et Principal Adjoint de collège » du livre de Zohra Guillaume  dans Fraternité… Au pied du Mur !  Ed Lacour
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Muriel





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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Mar 26 Déc - 22:01Message n°61sur la page N°1

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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Mer 27 Déc - 5:47Message n°62sur la page N°1

Joli conte, Béatrice annesophie


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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Mer 27 Déc - 6:26Message n°63sur la page N°1

Des textes émouvants, tous le sont merci


« Les vertus réelles excusent et plaignent ~ les fausses vertus accusent et déchirent »   Paul Thiébault
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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Mer 27 Déc - 6:29Message n°64sur la page N°1

Larmes de femme

Un petit garçon demanda à sa mère :

- Pourquoi pleures-tu ?
- Parce que je suis une femme, lui répondit-elle.
- Je ne comprends pas, dit-il.

Sa mère le prit dans ses bras et lui dit :
- Et jamais tu ne comprendras.

Plus tard le petit garçon demanda à son père :

- Pourquoi maman pleure-t-elle ? Je ne comprends pas !
- Toutes les femmes pleurent sans raison, fut tout ce que son père put lui dire.

Devenu adulte, il demanda à Dieu :

- Seigneur, pourquoi les femmes pleurent-elles aussi facilement ?

Et Dieu répondit :

- Quand j'ai fait la femme, elle devait être spéciale. J'ai fait ses épaules assez fortes pour porter le poids du monde ; et assez douces pour être confortables.

Je lui ai donné la force de donner la vie, et celle d'accepter le rejet qui vient souvent de ses enfants.

Je lui ai donné la force pour lui permettre de continuer quand tout le monde abandonne, et celle de prendre soin de sa famille en dépit de la maladie et de la fatigue.

Je lui ai donné la sensibilité pour aimer ses enfants d'un amour inconditionnel, même quand ces derniers l'ont blessée durement.

Je lui ai donné la force de supporter son mari dans ses défauts et de demeurer à ses côtés sans faiblir.

Et finalement je lui ai donné des larmes à verser quand elle en ressent le besoin.  

Tu vois mon fils, la beauté d'une femme n'est pas dans les vêtements qu'elle porte, ni dans son visage, ou dans la façon de se coiffer les cheveux.

La beauté d'une femme réside dans ses yeux. Car c'est la porte d'entrée de son cœur - le lieu où réside l'amour. Et c'est souvent par ses larmes que tu vois passer son cœur.

Toutes les femmes sont belles, et nous devons les encourager à s'aimer telles qu'elles sont et à avoir une juste estime d'elles-mêmes.


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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Mer 27 Déc - 7:07Message n°65sur la page N°1

Joli hymne à la femme, Johane! [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]


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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Mer 27 Déc - 8:57Message n°66sur la page N°1

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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Mer 27 Déc - 9:10Message n°67sur la page N°1

Merci Béatrice, Muriel, Johane pour vos partages. Je trouve que ça fait un bien fou de lire de jolies choses, douces, tendres et pleines d'espoir. Merci de tout ♥️
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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Jeu 28 Déc - 21:15Message n°68sur la page N°1

Le conte du pauvre fermier chinois et de son cheval blanc - Lao Tseu


Cette histoire très connue à le mérite de relativiser en permanence un fait ou un évènement en fonction du contexte qui l’entoure…

Un pauvre chinois suscitait la jalousie des plus riches du pays parce qu’il possédait un cheval blanc extraordinaire. Chaque fois qu’on lui proposait une fortune pour l’animal, le vieillard répondait :

- « Ce cheval est beaucoup plus qu’un animal pour moi, c’est un ami, je ne peux pas le vendre.»

Un jour, le cheval disparut. Les voisins rassemblés devant l’étable vide donnèrent leur opinion :

- « Pauvre idiot, il était prévisible qu’on te volerait cette bête. Pourquoi ne l’as-tu pas vendue ? Quel Malheur ! »

Le paysan se montra plus circonspect :

- « N’exagérons rien dit-il. Disons que le cheval ne se trouve plus dans l’étable. C’est un fait. Tout le reste n’est qu’une appréciation de votre part. Comment savoir si c’est un bonheur ou un malheur ? Nous ne connaissons qu’un fragment de l’histoire. Qui sait ce qu’il adviendra ? »

Les gens se moquèrent du vieil homme. Ils le considéraient depuis longtemps comme un simple d’esprit. Quinze jours plus tard, le cheval blanc revint. Il n’avait pas été volé, il s’était tout simplement mis au vert et ramenait une douzaine de chevaux sauvages de son escapade. Les villageois s’attroupèrent de nouveau :

- « Tu avais raison, ce n’était pas un malheur mais une bénédiction. »

- « Je n’irais pas jusque là, fit le paysan. Contentons-nous de dire que le cheval blanc est revenu. Comment savoir si c’est une chance ou une malchance ? Ce n’est qu’un épisode. Peut-on connaître le contenu d’un livre en ne lisant qu’une phrase ? »

Les villageois se dispersèrent, convaincus que le vieil homme déraisonnait. Recevoir douze beaux chevaux était indubitablement un cadeau du ciel, qui pouvait le nier ?

Le fils du paysan entreprit le dressage des chevaux sauvages. L’un d’eux le jeta à terre et le piétina. Les villageois vinrent une fois de plus donner leur avis :

- »Pauvre ami ! Tu avais raison, ces chevaux sauvages ne t’ont pas porté chance.

Voici que ton fils unique est estropié. Qui donc t’aidera dans tes vieux jours ? Tu es vraiment à plaindre. »

- « Voyons, rétorqua le paysan, n’allez pas si vite. Mon fils a perdu l’usage de ses jambes, c’est tout. Qui dira ce que cela nous aura apporté ? La vie se présente par petits bouts, nul ne peut prédire l’avenir. »

Quelque temps plus tard, la guerre éclata et tous les jeunes gens du village furent enrôlés dans l’armée, sauf l’invalide.

- « Vieil homme, se lamentèrent les villageois, tu avais raison, ton fils ne peut plus marcher, mais il reste auprès de toi tandis que nos fils vont se faire tuer. »

« Je vous en prie, » répondit le paysan, « ne jugez pas hâtivement. Vos jeunes sont enrôlés dans l’armée, le mien reste à la maison, c’est tout ce que nous puissions dire. Dieu seul sait si c’est un bien ou un mal. »


extrait d'un livre de THOMAS D'ANSEMBOURG


Dans la vie, rien n'est prévisible. Elle n'est faite que d'impondérables, de hasard, de chance ou de malchance. On appelle cela les aléas de la vie et c'est ce qui fait la vie tout simplement. Quel ennui si tout était prévisible, si jamais aucune surprise ne nous surprenait. Je n'attends rien de la vie, je le vis simplement. Ainsi je ne suis jamais déçue, je savoure les bonheurs, je pleure les chagrins mais je laisse à l'avenir le choix de me surprendre. Pour plagier Einstein, je pense que dans l'existence tout est relatif car personne ne peut dire de quoi demain sera fait. Comme dirait un ami : profite de l'instant présent, il n'y a que lui qui compte. Et si tout malheur qui nous arrive est parfois un bien pour nous, ayons à l'esprit que l'inverse est vrai aussi.

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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Jeu 28 Déc - 22:52Message n°69sur la page N°1

Merci Pestoune Smile
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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Sam 30 Déc - 22:17Message n°70sur la page N°1

Le grand-père qui faisait fleurir les arbres

Il y a bien longtemps, dans un tout petit village, vivaient un très vieil homme et sa femme. Ils n’avaient jamais pu avoir d’enfant et avaient adopté un petit chien qu’ils aimaient tendrement. Celui-ci, reconnaissant et fidèle, ne s’éloignait jamais d’eux. Il les suivait partout où ils allaient.
Un jour que le vieux travaillait dans son jardin, il remarqua que le chien flairait et grattait le gazon sous un vieux pin. Aussitôt, le vieux s’arrêta et regarda. Le chien s’élança bientôt vers lui en aboyant de toutes ses forces puis retourna au même endroit où il se remit à gratter. Le chien s’agitait tant que le vieil homme prit sa pioche et s’approcha de l’animal qui se mit à aboyer très fort. Le vieux donna quelques coups de pioche.
Au bout d’un moment, il entendit un son clair et un coffre doré apparut. Le vieux l’ouvrit et découvrit une quantité de pièces d’or brillantes. Il appela sa femme qui l’aida à dégager le coffre et ils l’emportèrent à la maison. En un instant, les deux vieux étaient devenus riches. Pour remercier leur chien ils lui donnèrent à manger ce qu’ils pouvaient trouver de mieux.
Dans le petit village, l’histoire de la découverte du trésor se répandit comme une traînée de poudre.
Un de leurs voisins pensait sans cesse au bonheur des vieux et à leur fortune. Il en perdit même le sommeil de jalousie. Il se persuada que leur petit chien avait un don pour découvrir les trésors enfouis. Il se rendit chez ses voisins afin qu’ils lui prêtent leur animal.

— Nous aimons tellement notre chien que nous ne saurions nous séparer de lui, pas même une heure, lui dit le vieillard.

Mais l’envieux ne se lassa pas. Chaque jour, il revenait avec la même demande. Comme les deux vieux étaient bons et ne savaient pas refuser, ils finirent par prêter leur chien à leur voisin. Le voisin mena le chien dans son jardin. Aussitôt, le chien s’arrêta, flaira le sol et se mit à gratter. Le voisin accourut suivi de sa femme. Ils creusèrent la terre et trouvèrent un grand tas d’ordures puantes et de vieux os. L’homme fut rempli d’une colère violente . Il leva sa pioche et tua le petit chien.

Le méchant homme courut en geignant chez ses voisins et d’une petite voix leur dit :
— Quel malheur ! Votre petit chien est mort brusquement en arrivant dans mon jardin. Personne ne sait comment cela est arrivé. Je n’en suis pas responsable. Je vous ai porté la nouvelle aussitôt, pour que vous puissiez l’enterrer.

Avec beaucoup de tristesse, les deux vieux portèrent leur petit chien à l’endroit où il avait trouvé le trésor, et l’ensevelirent sous le vieux pin. Ils pleurèrent longtemps car, maintenant, ils n’avaient plus personne à aimer.

Cependant, une nuit, pendant que le vieillard dormait, son chien lui apparut en rêve et lui dit :
— Coupe l’arbre sous lequel je suis enseveli, et fais-en un mortier à riz. Cela te consolera.

Dès le matin, le vieillard raconta son rêve à sa femme. Celle-ci lui conseilla de suivre les instructions du chien. Son message ne pouvait être qu’un bon message. Le vieux coupa l’arbre et, dans son tronc, fit un grand et beau mortier. Le temps de la récolte du riz arriva. Le vieillard entassa les grains dans son nouveau mortier. Mais quand il commença à les décortiquer, il en sortit des pièces brillantes en or. Les deux vieux se réjouirent de tout leur cœur.

Dans le petit village, l’histoire du mortier se répandit comme une traînée de poudre.

Le voisin envieux pensait sans cesse au bonheur des vieux et à leur fortune. La jalousie l’empêchait de dormir. Il retourna chez ses voisins et leur demanda de lui prêter leur mortier à riz.
— Nous aimons tellement notre mortier que nous ne saurions nous séparer de lui, pas même une heure, lui dit le vieillard.

Mais l’envieux ne se lassa pas. Chaque jour, il revenait avec la même demande. Comme les deux vieux étaient bons et qu’ils ne savaient pas refuser, ils finirent par prêter leur mortier à leur voisin.De retour chez lui, le voisin, aidé par sa femme, amena des ballots entiers de riz. Il versa des grains dans le mortier et se mit aussitôt à les décortiquer. Mais, au lieu de pièces d’or, il n’en sortit que d’affreuses ordures puantes et de vieux os. L’homme fut rempli d’une colère violente . Il prit un marteau et brisa le mortier en petits morceaux qu’il jeta dans le feu.

Le méchant homme courut en geignant chez ses voisins et d’une petite voix leur dit :
— Quel malheur ! Votre mortier s’est mis à flamber sans raison. Personne ne sait comment cela est arrivé. Je n’en suis pas responsable. Je vous ai porté la nouvelle aussitôt, pour que vous ne l’attendiez pas en retour.

Les bons vieux furent très peinés en apprenant ce qui était arrivé. Ils allèrent se coucher bien tristes.
Une fois encore, le vieil homme vit son chien en rêve. Celui-ci lui dit d’aller chez son voisin et de prendre les cendres du mortier brûlé, de les emporter sur la grande route et, lorsque le roi passerait, de grimper sur un cerisier encore dénudé et d’y répandre les cendres.

Le matin suivant, le vieillard se rendit chez son voisin et emporta les cendres de son mortier. Il les mit dans un sac et s’en alla sur la grande route, là où les cerisiers étaient dénudés car ce n’était pas encore la saison où les arbres se parent de leurs robes de fleurs multicolores et odorantes.

À peine arrivé, le vieux vit venir le roi et toute sa suite. Au lieu de se jeter face contre terre, comme le faisaient tous les sujets en signe de respect, il grimpa bien vite sur un cerisier où il resta perché.
Le roi, lorsqu’il l’aperçut, ordonna de saisir le vieux et de le châtier. Mais, sans se laisser intimider, le vieillard ouvrit son sac et répandit sur les arbres alentour les fines cendres du mortier. Aussitôt, tout fleurit de rosé et de blanc et l’air s’emplit d’un parfum enivrant. Le roi en fut si intrigué et charmé qu’il offrit de riches présents au vieillard.

Dans le petit village, l’histoire des cendres se répandit comme une traînée de poudre.
Le voisin envieux pensait sans cesse au bonheur des vieux et à leur fortune. La jalousie l’empêchait toujours de dormir. Il ramassa dans la cheminée le reste des cendres du mortier et s’en alla lui aussi sur la grande route.

À peine arrivé, il vit venir le roi et toute sa suite. Au lieu de se jeter face contre terre, il grimpa bien vite sur un cerisier où il resta perché. Le roi, lorsqu’il l’aperçut, ordonna de saisir le voisin envieux et de le châtier. Mais celui-ci ouvrit son sac et répandit sur les arbres alentour les fines cendres du mortier. Aussitôt, d’affreuses ordures puantes et de vieux os volèrent au visage du roi et des hommes de sa suite. Les gardes attrapèrent le méchant homme et le jetèrent en prison, où il resta de longues années.

Dans le petit village, l’histoire du voisin envieux se répandit comme une traînée de poudre.
Lorsqu’il fut enfin remis en liberté, personne ne voulut avoir affaire à lui et il mourut piteusement peu après.
Quant aux deux vieux, ils n’oublièrent jamais leur cher petit chien.

Anne Buguet
Le grand-père qui faisait fleurir les arbres
Paris, Flammarion-Père Castor, 2002
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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Sam 30 Déc - 22:53Message n°71sur la page N°1

Très beau texte Pestoune Smile
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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Mar 2 Jan - 19:30Message n°72sur la page N°1

Un jour d’école ordinaire

Un jour d’école ordinaire, un petit garçon ordinaire s’éveilla, tiré de ses rêves ordinaires, quitta son lit ordinaire, fit un pipi ordinaire, un brin de toilette ordinaire, mit ses habits ordinaires et prit un petit déjeuner ordinaire.
Le petit garçon ordinaire brossa ses dents ordinaires, fit un bisou ordinaire à sa maman ordinaire et se rendit à son école ordinaire. Dans les rues ordinaires, tout en passant devant les boutiques ordinaires et traversant les carrefours ordinaires, le petit garçon ordinaire avait des pensées ordinaires. Lorsqu’il arriva à son école ordinaire, le petit garçon ordinaire joua au football ordinaire avec ses camarades ordinaires jusqu’à ce que sonne la cloche ordinaire.
Le petit garçon ordinaire entra dans sa classe ordinaire et s’assit à sa table ordinaire. Alors, il se passa quelque chose qui sortait de l’ordinaire…
— Bonjour tout le monde ! dit un personnage tout à fait extraordinaire en faisant irruption dans la salle de classe. Je m’appelle Monsieur Youpi et je suis votre nouvel instituteur. Comme vous ne me connaissez pas et que je ne vous connais pas non plus, j’ai eu une idée pour découvrir ce que vous avez dans le crâne…
Tout en distribuant des feuilles, monsieur Youpi annonça :
— Pour notre premier jour ensemble, je voudrais que vous écoutiez de la musique. Je voudrais que vous laissiez la musique faire naître des images en vous et j’aimerais que vous écriviez une histoire en partant de ces images. C’est bien compris ?
Alors, les élèves ordinaires se mirent à chuchoter :
— Il est toqué ! Il est zinzin !
— Il est aussi givré que mes crèmes glacées !
— Musique ? Images ? Histoires ?
— Que veut-il faire ?
Monsieur Youpi répondit :
— Chut, fermez les yeux, ouvrez grand vos oreilles et écoutez.
Et la musique commença : une musique tonitruante, assourdissante, qui gronda, roula, enfla et emplit toute la salle de classe. Tandis que la musique tonnait, glissait, valsait, plongeait, montait, descendait, virevoltait, le petit garçon ordinaire se mit à écrire.
L’histoire ne voulait pas dire grand-chose, mais cela lui était bien égal.
Il avait beau écrire le plus vite possible, ce n’était jamais assez rapide : il avait trop à raconter. On aurait dit qu’un barrage avait cédé dans sa tête et que les mots se déversaient sans retenue… et il jouait avec les mots, et il se perdait, il se perdait dans le jeu, le jeu de l’histoire à raconter. C’était extraordinaire…
Et les autres enfants ?
Certains écrivirent des histoires de géants, d’autres des histoires de magie, des histoires de gentilles petites filles ou des histoires de petits garçons au front orné d’une cicatrice en forme d’éclair. Certains écrivirent n’importe quoi parce que la musique ne voulait rien dire pour eux et Marie Carola lut une bande dessinée.
Certains écrivirent des histoires qui, à leur avis, pourraient plaire à l’instituteur, d’autres devinrent des héros, d’autres des méchants et d’autres encore trouvèrent que tout cela était complètement idiot. Quant à Pierre Farcy, il s’endormit.
— Avec un peu de chance, il fera de beaux rêves, remarqua Monsieur Youpi.
À la fin de cette journée extraordinaire, le petit garçon ordinaire vit Monsieur Youpi monter dans sa voiture.
— Monsieur, dit le petit garçon ordinaire, c’était formidable, l’école, aujourd’hui. Je n’ai jamais vu ça. C’était magique !
— Alors, je suis toujours zinzin ? demanda Monsieur Youpi en souriant.
Le petit garçon ordinaire rougit.
— Je suis impatient de lire ton histoire, dit Monsieur Youpi. À demain.
Et il franchit le portail dans un nuage de fumée.
Lorsqu’il fut l’heure d’aller dormir, le petit garçon ordinaire mit son pyjama ordinaire, brossa ses dents ordinaires, fit un pipi ordinaire, un petit bisou à son papa et à sa maman ordinaires, se coucha dans son lit ordinaire…… et fit des rêves extraordinaires.

Colin McNaughton
Un jour d’école ordinaire
Paris, Gallimard Jeunesse, 2004
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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Mar 2 Jan - 20:51Message n°73sur la page N°1

Très beau Smile
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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Mer 3 Jan - 9:59Message n°74sur la page N°1

L’homme DIEU


Une vieille légende hindoue raconte qu'il y eût un temps où tous les hommes étaient des dieux. Mais ils abusèrent tellement de leur divinité que Brahma décida de leur ôter le pouvoir divin et de le cacher à un endroit où il leur serait impossible de le retrouver. Le grand problème fut donc de lui trouver une cachette.

Lorsque les dieux furent convoqués à un conseil pour résoudre ce problème, ils proposèrent ceci: "Enterrons la divinité de l'homme dans la terre."

Mais Brahma répondit: "Non, cela ne suffit pas, car l'homme creusera et la trouvera."

Alors les dieux dirent: "Dans ce cas, jetons la divinité dans le plus profond des océans."

Mais Brahma répondit à nouveau: "Non, car tôt ou tard, l'homme explorera les profondeurs de tous les océans, et il est certain qu'un jour, il la trouvera et la remontera à la surface."


Déconcertés, les dieux proposèrent: "Il ne reste plus que le ciel, oui, cachons la divinité de l'homme sur la Lune."

Mais, Brahma répondit encore: "Non, un jour, l'homme parcourra le ciel, ira sur la Lune et la trouvera."

Les dieux conclurent: "Nous ne savons pas où la cacher car il ne semble pas exister sur terre ou dans la mer d'endroit que l'homme ne puisse atteindre un jour."

Alors Brahma dit: "Voici ce que nous ferons de la divinité de l'homme: nous la cacherons au plus profond de lui-même, car c'est le seul endroit où il ne pensera jamais à chercher."

Depuis ce temps-là, conclut la légende, l'homme a fait le tour de la terre, il a exploré, escaladé, plongé et creusé, exploré la lune et le ciel à la recherche de quelque chose qui se trouve en lui.
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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Ven 5 Jan - 0:32Message n°75sur la page N°1

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La légende de l'Arc en Ciel ! (Les couleurs du Monde!)

Un jour, les couleurs du monde ont commencé à se quereller…
Chacune disait qu’elle était la plus belle…
la plus importante… la plus utile… la favorite!

Vert  dit :
Je suis définitivement la plus importante.
Je suis le signe de la vie et de l’espoir.
J’ai été choisie par les champs, les arbres et les feuilles.
Sans moi, les animaux ne vivraient pas.
Regardez un pré de montagne et vous constaterez que je suis majoritaire.


Bleu  l’interrompt :
Tu ne penses qu’en fonction de la terre,
mais considère le ciel et la mer.
C’est l’eau qui est la base de la vie.
Le ciel offre l’espace, la paix et la sérénité.


Jaune  riait sous sa cape :
Vous êtes tellement sérieuses, vous autres !
Moi, j’apporte le rire, la gaieté, la chaleur dans le monde.
Le soleil est jaune, et plusieurs étoiles aussi.
Chaque fois que vous regardez un tournesol, le monde entier se met à rire.
Sans moi, il n’y aurait pas de plaisir.


Orange  n’est pas d’accord :
Je suis la santé et la force.
Je suis précieuse parce que j’apporte de la vie à l’humanité.
Je transporte les plus importantes vitamines.
Pensez aux carottes, citrouilles, oranges, mangues et papayes.
Je ne suis pas toujours là à l’année, mais, quand j’éclaire le ciel à mon lever
et à mon coucher, ma beauté est telle que personne ne pense à aucun d’entre vous.


Rouge  ne peut s’empêcher de crier :
Je suis la vie de chacun de vous.
Je suis le sang… le sang de votre vie.
Je suis la couleur du danger ou de la bravoure.
Je suis toujours prête à me battre pour une bonne cause.
Je suis la couleur de la passion et de l’amour.


Violet  se lève de toute sa grandeur.
Elle est très grande, et dit avec grande pompe :
Je suis la couleur royale, la couleur du pouvoir.
Les rois, les chefs et les archevêques m’ont toujours choisie
parce que je suis le signe de l’autorité et du pouvoir.
Les gens ne me questionnent jamais ! Ils écoutent et obéissent.


Indigo  se lève à son tour :
Pensez à moi. Je suis la couleur du silence.
Vous ne me remarquez pas mais sans moi, vous deviendrez superficielles.
Je représente la pensée et la réflexion, la nuit et les eaux profondes.
Vous avez besoin de moi pour votre équilibre.


Et toutes ces couleurs sont parties, chacune convaincue de leur unique supériorité.
Leur querelle est devenue de plus en plus importante avec les jours.
Soudainement, un éclair apparut et un bruit de roulement tonnerre se fit entendre.
La pluie se mit à tomber.
Les couleurs ayant très peur se sont toutes rapprochées les unes des autres pour se réconforter.

Au milieu de la clameur…
Pluie est apparue :


Vous autres, stupides couleurs, vous disputant,
chacune essayant de dominer l’autre…
ne savez-vous donc pas que vous êtes toutes faites
pour un besoin unique et spécial ?
Joignez-vous et venez à moi.

Faisant ce qu’on leur demandait, les couleurs se sont réunies.
Pluie a continué à parler :
À partir de maintenant, quand il pleuvra,
chacune de vous s’étirera dans le ciel en une demi-boucle
pour vous rappeler que vous pouvez vivre dans la paix.
Cet arc-en-ciel sera un signe d’espoir pour demain.

Et, quand une grosse pluie lavera le monde,
et qu’ensuite arc-en-ciel apparaîtra dans le ciel,
souvenez-vous de vous apprécier l’une et l’autre.
L’amitié est comme un arc-en-ciel.

Rouge est comme une pomme, tendre jusqu’au noyau.
Orange, comme une flamme qui ne s’éteint pas.
Jaune, comme le soleil qui éclaire votre journée.
Vert , comme les plantes qui ne cessent de grandir.
Bleu, comme l’eau si pure.
Violet, comme une fleur prête à éclore.
Indigo, comme un rêve qui meuble votre cœur.


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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Ven 5 Jan - 6:12Message n°76sur la page N°1

Superbe, Muriel annesophie


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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Ven 5 Jan - 6:51Message n°77sur la page N°1

+1 Muriel. Magnifique
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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Ven 5 Jan - 22:39Message n°78sur la page N°1

Magnifique Smile
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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Ven 5 Jan - 22:40Message n°79sur la page N°1

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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Sam 24 Fév - 21:04Message n°80sur la page N°1

Lucille et son chat







Lucille vit en Sicile. Encore étudiante, elle y enseigne le Français. Elle habite Caltagirone, une jolie petite ville, perchée au cœur de l’île entourée de multiples collines. Son appartement, situé dans le centre historique, est une vraie pièce de musée. On y trouve-là des objets des siècles précédents. C’est par la fin d’un après-midi passé à réviser, après son plat de pasta (1) habituel et la sieste traditionnelle, qu’elle va le rencontrer.




Elle joue à l’Italienne : elle aime s’attarder à la fenêtre et regarder les gens qui passent dans la rue. Elle est alors sur son lit et s’apprête à ouvrir la fenêtre car dans ce pays il fait souvent très chaud et l’air frais du début de soirée apaise cette fin de printemps. De l’extérieur, la fenêtre, au dernier étage d’un imposant bâtiment, ressemble à un œil et est entourée de sculptures. Elle semble s’ouvrir sur une pièce secrète des châteaux d’autrefois.




Observant et rêvant du haut de sa tour, Lucille entend une petite cloche qui tinte, pas une cloche de clocher car ici elles résonnent tous les quarts d’heure vu le nombre d’églises dispersées et cachées dans la vieille ville ; mais une cloche qui annonce le passage du paysan qui vient vendre ses légumes à l’aide d’une charrette tirée par un âne. Quand il apparaît, chargé de toutes ces verdures qui débordent du véhicule, il énumère à tue-tête sa marchandise : « Ruchetta, melanzane, pomodori, zucchine, cavoli (2)! » Quelques vieilles dames s’approchent, un sac à la main pour acheter ce dont elles ont besoin pour le dîner.




Soudain, un chant retentit au loin, plusieurs voix entonnent une triste mélodie. Elles approchent et Lucille voit apparaître au coin de la rue des hommes vêtus de longs habits blancs, dont certains portent une grosse croix dorée. Ils sont suivis d’hommes, de femmes et d’enfants, et tous chantent cet air tellement beau qu’il semble venir du ciel. Puis la procession passe et lui succède un va-et-vient de toutes sortes de voitures, notamment des petits véhicules à trois roues, bien pratiques pour transporter du matériel, et des Vespa, le scooter typiquement italien.




Quand tout à coup, Lucille aperçoit une petite boule sombre qui se faufile près des voitures garées le long du trottoir. C’est un chat ! Un petit chat ! Depuis qu’elle vit en Italie, Lucille en a vus des chiens et des chats, mais un grand nombre d’entre eux vit à l’état sauvage. Ils n’ont pas de maître ni de maison. Ils sont souvent très sales et malades, leur vie est difficile. Et il est encore plus difficile de les approcher pour les caresser. Lucille le sait très bien, elle qui adore les chats, depuis huit mois qu’elle habite ici, elle n’a pas pu en toucher un seul, même avec beaucoup de patience.




Donc ce jeune chat est en train de flâner devant la porte de son immeuble. Comme elle en a l’habitude, elle l’appelle avec ce bruit caractéristique qui rappelle les bisous, mais bien plus fort pour qu’il l’entende. C’est alors que la petite boule lève la tête et lui répond en miaulant. Lucille n’en croit pas ses yeux ni ses oreilles. Elle, qui est en manque de câlins félins depuis qu’elle est partie de chez ses parents en y laissant le gros matou de la famille, ne réfléchit même pas : à toute allure, elle enfile une paire de baskets, se précipite vers la porte et descend les escaliers quatre par quatre. En descendant, elle se dit qu’il ne sera sûrement plus là à son arrivée, mais tant pis, elle a trop envie d’un bisou de chat.




C’est dans un mélange de peur et d’excitation qu’elle ouvre la porte qui donne sur la rue. Et là, le conte de fée commence, c’est magique, merveilleux, exceptionnel, miraculeux ! Le petit chat est planté-là, devant la porte, comme s’il l’attendait. Quand elle approche, il ne s’enfuit pas mais vient se frotter entre ses jambes. Lucille le prend dans ses bras et, à sa grande surprise, il se serre contre elle et glisse sa petite tête dans son cou tout en se mettant a ronronner. Lucille est aux anges. Toujours sans réfléchir, elle remonte dans ses appartements, tranquillement cette fois, avec le chat dans les bras.




Arrivée chez elle, elle le dépose délicatement sur le sol et se met à l’observer. Ce petit minou est vraiment hardi, il n’a peur de rien et commence à se promener en reniflant un peu partout. On dirait un petit tigre : son pelage est marron-gris avec par endroits des rayures et des sortes de tâches noires. Sur son dos, il y a une ligne noire plus grosse que les autres. Sa queue courte est rayée aussi. De face, sa tête porte des traits noirs qui encadrent ses yeux verts. Cela fait penser à la façon qu’avaient les Egyptiens de se maquiller. Dans son cou, les rayures ressemblent à des colliers les uns à côté des autres. Lucille remarque qu’il est très poussiéreux, qu’il a une patte arrière qui boîte légèrement et que le bout d’une de ses oreilles a été coupé. Pauvre bébé ! Si jeune et déjà à affronter la dure expérience de la rue. Lucille ressent le besoin de le protéger en pensant à la vie qui l’attend dehors, comme une mère veille sur son petit.

Elle ne peut imaginer redescendre et le laisser dans la rue, là sur le trottoir. Non, elle ne pourra jamais l’abandonner ainsi ! Et puis, lui aussi a l’air d’être content d’avoir trouvé une maison et de l’affection, sinon il se serait sauvé. Adviendra ce que pourra ! Qui verra, saura ! Mais en attendant, il doit avoir faim ce petit loulou. Lucille n’a pas de nourriture pour chat mais quand on est un chat de la rue, on ne fait pas le difficile, on est habitué à manger de tout. C’est donc quelques morceaux de Provolone (3) que Lucille va lui tendre et qu’il va dévorer sur-le-champ, puis un reste de pasta al sugo (4). A présent qu’ils ont fait connaissance, Lucille se rend compte que pour devenir amis, il faut bien qu’elle puisse l’appeler. Elle doit donc lui trouver un nom. Elle repense alors au moment où de sa fenêtre elle l’a aperçu pour la première fois et qu’il a répondu à son appel. Cela lui rappelle une scène célèbre dans une pièce de théâtre de Shakespeare intitulée « Roméo et Juliette » où les deux amoureux se parlent, Juliette à son balcon et Roméo dans le jardin. Elle a trouvé, ce sera « Roméo » !




La nuit tombe. Bien entendu, les petits chats aussi ont des besoins et Lucille n’a pas de litière. Tant pis, elle improvise une boîte à chaussures qu’elle remplit de bandes de papier journal, elle avait lu ça un jour dans un magazine. Et Roméo, curieux comme il est, vient tout de suite sentir ce nouvel objet. Lucille gratte avec ses doigts dans la boîte pour essayer de lui faire comprendre à quoi ça sert. Et c’est efficace car Roméo saute dedans, gratte le journal avec ses deux pattes avant et s’installe pour faire son pipi. Lucille le félicite et se dit que ce petit chat comprend tout très vite. La première nuit avec Roméo se passe. Il dormira sur le lit, tout contre Lucille en ronronnant de plaisir.




Le lendemain matin, Lucille doit aller travailler. Roméo a tout ce qu’il lui faut, elle va le laisser dans l’appartement. Au réveil, elle a remarqué un changement : Roméo est propre, son poil est brillant, il n’a plus de poussière. Il a fait sa toilette comme le font les chats mais il n’a pas dormi dans la saleté des rues de la ville. Elle rentre à midi et cet après-midi, elle va rester étudier chez elle. Son appartement est tout en haut de l’immeuble. Un porte-fenêtre, jaune et verte avec des motifs comme sur les vitraux des églises, donne sur une grande terrasse bordée d’un magnifique balcon en fer forgé. Sur la terrasse se trouvent toutes sortes de plantes grasses et de cactus. Il y en a beaucoup par ici, dans les jardins, sur le bord des routes, ça pousse comme les mauvaises herbes car le climat est chaud. Lucille adore jardiner, en plus du balcon elle a une superbe vue sur toute la ville et ses beaux bâtiments. Elle ouvrirait bien la porte-fenêtre mais elle a peur que Roméo sorte et ne revienne jamais, car de la terrasse il peut aller sur les toits des autres immeubles, des maisons et ainsi redescendre dans la ville. Elle pense que si elle l’habitue encore une journée dans l’appartement pour lui faire comprendre que maintenant ici c’est aussi chez lui, peut-être qu’il n’aura pas envie de la quitter et de repartir vagabonder dans les rues. Le soir tombe et une deuxième nuit passe.




Le lendemain matin, Lucille doit aller au lycée pour y enseigner le Français. Elle se dit qu’elle n’a plus le droit de retenir ce chat prisonnier, elle va laisser la porte-fenêtre ouverte et lui rendre sa liberté. Elle va le laisser choisir la vie qu’il veut. C’est donc en tremblant légèrement qu’elle ouvre car elle appréhende de ne plus jamais le revoir. Elle s’était déjà bien attachée à ce petit animal. Elle l’adore. Evidemment, Roméo met tout de suite le bout de son nez dehors. Il explore tranquillement la terrasse et tourne autour des pots de fleurs. Lucille le laisse faire mais continue de lui parler pour qu’il ne l’oublie pas. Et petit à petit, Roméo va s’éloigner, sauter de toit en toit. Lucille l’observe tout en l’appelant doucement. A chaque fois, il se retourne et la regarde, puis repart à l’aventure. C’est l’heure, elle doit partir. Roméo n’est plus qu’un petit point au loin et c’est le cœur serré que Lucille descend les escaliers.




Toute la matinée, elle s’inquiète et imagine les choses terribles qui pourraient lui arriver. Elle se sent comme une maman qui a laissé son bébé. Ouf ! La cloche sonne, c’est l’heure de rentrer. L’avantage en Italie, c’est qu’il n’y a école que le matin, comme ça l’après-midi on est libre. Lucille a hâte de rentrer. Son cœur bat la chamade. Elle descend du bus, arrive devant l’immeuble, monte les escaliers, ouvre la porte et là, devinez qui l’attend tranquillement assis ? Roméo ! O joie ! O bonheur ! Lucille jubile. Il l’a choisie elle, comme amie pour partager sa vie. Désormais, elle aura toujours confiance en lui. Et Roméo a bien compris que Lucille serait toujours là pour lui, qu’elle l’a adopté.




Depuis ce jour, Roméo et Lucille ne se sont plus jamais quittés. Ils sont retournés vivre en France et cela fait maintenant dix ans qu’ils partagent du bonheur et des câlins.




1•Pâtes

2•Roquette, aubergines, tomates, courgettes, choux

3•Fromage à pâte molle italien

4•Pâtes à la sauce tomate




Cécile Bonato –




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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Ven 12 Oct - 21:00Message n°81sur la page N°1

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Chaton


Il était une fois un chaton qui était si petit qu’il tenait assis dans la paume d’une main. Sa mère était une vieille chatte qui vivait avec une Femme Très Sage, au sommet d’une colline ronde et verte.

• Le meilleur de la vie arrive souvent à la fin, dit la Femme Très Sage à la chatte très vieille.

Et elle l’appela Chaton parce que sa queue dorée n’était pas plus grosse que les chatons de saule qui dansaient devant sa fenêtre.

Au pied de la colline ronde et verte, vivaient un fermier et sa femme, qui cultivaient la terre alentour.

Et tout au fond, à l’intérieur de la colline, vivait le peuple des Tout-Petits, qui jamais ne naît, jamais ne meurt, et vit pour toujours.

Le fermier et sa femme n’avaient qu’un enfant, une petite fille, du nom de Coraline, qu’ils avaient attendue pendant de très longues années.

Lorsque Chaton fut assez grand pour quitter la maison, la Femme Très Sage l’installa dans un panier, et l’offrit à la fermière.

Comme ils descendaient la colline, elle expliqua à Chaton qu’il devrait veiller sur la fillette. Car, le jour même de sa naissance,

elle avait lu dans le ciel noir qu’un danger menaçait la petite Coraline.

Coraline et Chaton s’aimèrent tout de suite, et où l’un allait, l’autre suivait. Pendant les longues journées d’été, ils jouaient ensemble.

Et lorsque la nuit tombait, les boucles d’or de la petite fille et la fourrure cuivrée du petit chat se mêlaient sur l’oreiller.

Puis l’automne arriva. Un jour, Coraline s’en fut avec sa mère cueillir des mûres, Chaton glissé dans sa poche.

Mais à mesure que le temps passait, la fatigue gagna la petite fille. Sa mère la coucha au milieu des buissons et demanda à Chaton

de veiller sur elle. Il se pelotonna contre elle et, tout content, se mit à ronronner.

Le temps passa encore, les ombres s’allongèrent, et Chaton commença à s’agiter. Il joua avec une feuille qui voletait sous le nez de Coraline.

Puis un papillon se percha sur la chevelure dorée de la petite fille, mais n’y trouvant nulle fleur à butiner, s’envola.

Aussitôt Chaton se lança à sa poursuite, sautant de buisson en buisson, tournoyant et cabriolant parmi les herbes folles ;

il poursuivait les ailes du papillon qui scintillaient sous le soleil.

Il le suivit, gambada très loin, très loin dans la vallée, et oublia la petite fille.

Brusquement, une étrange quiétude enveloppa la vallée, et tout essoufflé, Chaton entendit les premières notes timides d’une musique

qui venait de l’intérieur de la colline. De peur, sa fourrure se hérissa, et il se tapit dans l’ombre. La musique ne cessait de grandir.

Sur la verte colline, dans la lumière tamisée du soleil, apparut le peuple des Tout-Petits. Ils étaient pâles, riaient, et dansaient

au son de l’étrange musique, qui ressemblait à un long soupir. Au milieu, le roi chevauchait fièrement un minuscule cheval,

et derrière lui, avançait la reine. Ses cheveux étaient aussi noirs que la nuit et ses yeux aussi verts que l’eau profonde des lacs.

Chaton vit avec terreur qu’ ils se dirigeaient vers la vallée, et que leurs pas les porteraient vers la petite fille endormie.

Il leur courut après mais, avec ses petites pattes, il n’arrivait pas à les rattraper. Ils disparurent peu à peu dans la pénombre.

Et avec eux, s’évanouit leur étrange musique. Chaton resta tout seul dans la nuit silencieuse.

Alors il se remit à courir, sautant par-dessus les rochers et les buissons aux méchantes épines. Il avait peur, si peur de ne pas retrouver Coraline.

Mais lorsqu’il arriva près de l’endroit où il l’avait laissée, il s’aperçut qu’elle dormait encore. Il ronronna de bonheur et se pelotonna à nouveau contre elle.





Mais lorsqu’il la toucha, sa peau lui parut étrangement glacée. Puis elle gémit et le repoussa. Lorsque sa mère arriva,

elle pensa qu’elle avait pris froid dans le brouillard du soir. Elle l’enveloppa dans son châle et la porta jusqu’à la ferme.

Puis elle envoya son époux chercher la Femme Très Sage qui observa longuement la petite fille.

Elle la regarda longtemps, très longtemps, puis soupira tristement :

• On a subtilisé votre enfant par enchantement, dit-elle. Ce n’est pas votre petite Coraline.

Celle-ci tombera malade à l’automne, avec la tombée des feuilles, et à Noël disparaîtra.



À ces mots, la mère de Coraline s’écria :

• Ma petite fille ! Où est ma petite fille ?

• Hélas, dit la Femme Très Sage, elle est à l’intérieur de la colline ronde et verte. Le peuple des Tout-Petits l’a enlevée.

La mère se mit à pleurer et le père demanda :

• Que leur avons-nous fait qu’ils nous veuillent tant de mal ?

• Ils ne vous veulent pas de mal, répondit avec douceur la Femme Très Sage. Ils sont immortels et n’ont pas d’enfants.

Ils ignorent les liens qui unissent les parents et les enfants. Quand les nuits deviennent trop longues sous la colline verte,

ils cherchent simplement des compagnons.

• Je descendrai dans leur royaume, s’écria bravement le fermier. Je leur dirai combien nous sommes tristes

et je les supplierai de nous rendre notre enfant.

Mais la Femme Très Sage secoua la tête :

• Jamais un homme n’a pu trouver la porte magique qui mène à l’intérieur de la colline verte.

Puis elle s’assit, plongée dans de profondes pensées, tandis que le fermier cherchait en vain à consoler sa femme.

Alors Chaton, qui de honte s’était caché sous les jupes de la Femme Très Sage, sauta sur ses genoux.

Il la fixa de ses yeux dorés, et elle devina ses pensées.

À la fin, elle sourit :

• Chaton ira là-bas, dit-elle. C’est par sa faute qu’on vous a enlevé votre enfant ; c’est grâce à son courage qu’il vous sera rendu.

• Un si petit chat ! s’exclama le fermier. À quoi servirait-il ?

• Il est de taille à vous sauver tous, répondit la Femme Très Sage. Le plus petit terrier de lapin lui servira de route jusqu’à l’intérieur de la colline.

• Et s’il la trouve, dit le fermier, comment un chat pourrait-il plaider notre cause ?

• Dans ce pays enchanté, même les bêtes peuvent parler et se faire comprendre.



Elle installa Chaton sur son épaule et s’en fut avec lui sur la colline verte. Et tandis qu’ils cheminaient, elle réfléchissait aux moyens d’aider le petit chat intrépide.

• Deux rivières pénètrent dans leur royaume souterrain, expliqua-t-elle à Chaton. L’une vient des noisetiers, et contient les eaux de la sagesse.

L’autre s’écoule de l’étang aux saules, et renferme les eaux de l’oubli. Aussi, ne devras-tu boire que l’eau du noisetier.

Elle déposa Chaton devant un terrier de lapin et lui donna un dernier conseil : jamais il ne devrait dire son nom.

• Si tu prononces ton nom, ils te jetteront un sort et te retiendront prisonnier dans leur royaume.





Plein de courage, Chaton se glissa dans le terrier et pendant un long moment erra dans ce dédale obscur, qui dégageait

une très forte odeur de terre. Soudain, il aperçut un rayon de lumière et se retrouva dans un monde étrange et merveilleux.

L’intérieur de la colline était découpé en vastes cavernes, dont les murs couverts d’or et d’argent se reflétaient dans les eaux vertes de lacs d’une insondable profondeur. Il s’avança au cœur même de la colline et, finalement, déboucha dans un magnifique palais qui scintillait sous le feu d’innombrables pierres précieuses.

Le roi du peuple des Tout-Petits avait organisé des festivités, avec de la musique, des danses et un somptueux repas.

À ses côtés était assise la reine, avec la petite Coraline sur les genoux. Caché dans l’ombre, Chaton comprit tout de suite combien la reine aimait la petite fille.

Elle caressait ses boucles d’or et lui offrait les mets les plus délicats. Il vit aussi combien Coraline aimait la reine : elle lui caressait le visage de ses mains potelées.

Alors il sut que la petite fille avait trempé ses lèvres dans les eaux de l’oubli, et qu’elle ne se souvenait plus de son ancienne maison.



Lorsque les Tout-Petits aperçurent Chaton, ils furent ravis de voir un chat aussi petit. La reine le prit et le déposa sur les genoux de la fillette.

Coraline ne se souvenait pas de Chaton, mais elle aima tout de suite ce nouveau camarade de jeu. Tout de suite aussi, le roi et la reine apprécièrent sa compagnie. Quand à Chaton, il trouvait que la vie était bien agréable dans le royaume qui se cache sous la colline verte.



Mais Chaton buvait uniquement l’eau du noisetier et ne voulait pas dire son nom : le roi comprit qu’il était bien décidé à les quitter un jour.

Il était venu chercher la petite fille, le souverain n’en doutait plus. Il en sourit car son pouvoir était si grand qu’il doutait fort qu’un chat aussi petit

pût l’emporter.

Le peuple des Tout-Petits adorait les devinettes ; ils passaient de longues soirées à en inventer. Chaton se révéla très doué à ce jeu, le roi n’en aimait que davantage sa compagnie, comme la reine aimait celle de la petite fille. Mais le souverain s’attristait que le chat

ne dise jamais son nom. Un jour, il partirait aussi soudainement qu’il était arrivé. Alors, une nuit que Coraline et Chaton dormaient,

le roi et la reine tinrent conseil. Ils cherchèrent, cherchèrent comment retenir à jamais le petit chat dans leur royaume.

Le lendemain eut lieu un grand banquet pour célébrer la nouvelle année, lorsque les jours commencent à s’allonger et les nuits à raccourcir.

Après le festin, les devinettes commencèrent : ils se montrèrent habiles, rirent beaucoup, mais Chaton l’emportait toujours.

Alors le roi du peuple des Tout-Petits sourit et dans ses yeux noirs passa une lueur moqueuse. Il leva sa coupe en argent et s’écria :

• Ne boiras-tu pas avec nous ?

Et comme le petit chat refusait de boire :

• Ne veux-tu pas nous dire ton nom ?

Et comme Chaton refusait de dire son nom :

• Tu es donc venu chercher la petite fille ?

Chaton comprit qu’il devait dire la vérité et répondit :

• C’est la vérité, Seigneur. C’est par ma faute que vous avez pu l’enlever, et que sa mère pleure depuis qu’elle a disparu.

• Mais si tu l’emmènes, la reine aussi va pleurer, répondit le roi du peuple des Tout-Petits, et je regretterai ton absence pendant les longues soirées d’hiver. Allons, pourquoi ne pas boire avec nous et oublier le passé ?

Ta vie est-elle si malheureuse dans notre royaume que tu veuilles bientôt nous quitter ?

• C’est une vie fort agréable, au contraire, convint tristement Chaton, mais jamais je ne serai heureux, tant que je n’aurai pas réparé mon étourderie.

Le roi fronça les sourcils. Tous étaient silencieux. Puis il sourit brusquement, comme si le soleil venait de percer de derrière les nuages.

• Je te lance un défi. Nous allons te poser trois devinettes. Si tu n’arrives pas à les résoudre, tu devras boire l’eau de ma coupe

et oublier le passé. Mais si tu réponds aux trois, la petite fille sera libre et vous pourrez partir.

Chaton regarda la reine, persuadé qu’elle refuserait de prendre un tel risque.

Mais elle était assise la joue appuyée contre celle de la petite fille.

Elle souriait, les yeux baissés. Pendant un bref instant, son sourire fit peur à Chaton. Puis il déclara :

• Il en sera fait comme vous le désirez, Seigneur.

• Dans ce cas, voici ma première devinette : Il n’est pas haut, mais jamais ne tarde. Sur les eaux de l’oubli, il m’attend.



Chaton réfléchit un moment, puis déclara :

• Seigneur, s’il n’est pas haut, c’est qu’il est BAS, et si jamais il ne tarde, c’est qu’il part TÔT.

Ce qui m’attend sur la rivière de l’oubli, c’est un BATEAU.

• Bravo ! s’écria le roi, en éclatant de rire.



Le peuple des Tout-Petits était émerveillé par la vivacité d’esprit de Chaton.

• Voici maintenant la seconde devinette : Tous sont au roi fidèlement attachés, pourtant ses racines ne poussent pas ici-bas.



Cette fois, Chaton dut réfléchir longtemps, beaucoup plus longtemps. Enfin, il expliqua:

• Seigneur, ’’Tous’’ désigne le PEUPLE, et s’ils sont attachés c’est qu’ils sont LIÉS, mais l’arbre qui ne pousse pas ici, c’est le PEUPLIER.

• Tu es vraiment un adversaire de taille, dit le roi.



Celui-ci, plein d’admiration, applaudit, en même temps que tout le peuple des Tout-Petits. Alors la reine parla à son tour et ses yeux étaient posés sur la fillette :

• Seigneur, laissez-moi poser la troisième devinette.

• Comme vous voudrez, répondit le roi.



Coraline avait oublié Chaton, mais il lui arrivait de murmurer son nom dans son sommeil. Et ce nom, la reine l’avait entendu.

Elle leva les yeux vers Chaton, et ses yeux étaient verts et profonds comme deux grands puits.

• Voici ma devinette, Petit Chat : Il chasse les souris et apprécie le poisson, au bout d’une branche, il se balance.



Tout espoir s’évanouit dans le cœur de Chaton. Il savait que le CHAT était le chasseur de souris. Et qu’il aime aussi le THON.

Et que le CHATON se balance au bout des branches de saule. Il savait que pour résoudre la devinette, il devait prononcer son nom et que,

du coup, la fillette serait libre. Mais dès qu’il aurait prononcé son nom, le roi pourrait exercer sur lui son pouvoir et le retenir dans son royaume.



Il hésita tandis que la reine l’observait à travers ses longs cils noirs. Sans doute pensait-elle qu’il préférerait sa liberté à celle de la fillette.

Mais Chaton savait qu’il ne serait jamais heureux tant qu’il n’aurait pas réparé son étourderie.



• Madame, dit-il, je préférerais me taire, mais la réponse est CHATON. La fillette est libre.



À ces mots, la reine et la fillette poussèrent ensemble un grand cri. Coraline cria de joie parce qu’elle se souvenait maintenant

de son petit chat, la reine cria de douleur parce que la petite fille allait disparaître.

Le roi du peuple des Tout-Petits était lui-même confronté à une énigme qu’il n’arrivait pas à résoudre.

L’enfant libre, la reine serait malheureuse. Mais il avait donné sa promesse. Et s’il gardait Chaton, la petite Coraline serait

malheureuse parce qu’elle adorait son petit chat.

S’ils partaient tous les deux, alors les nuits d’hiver seraient bien longues, sans Chaton pour jouer aux devinettes avec lui !

• Tu as résolu trois devinettes, Chaton, dit enfin le roi. Ne pourrais-tu résoudre cette quatrième énigme ?

• Je ne suis qu’un petit chat, Seigneur, répondit Chaton. Cette fois, ma vivacité d’esprit ne suffira pas.

Seule la sagesse pourra résoudre cette énigme. Allons trouver la Femme Très Sage.



Et ils s’en furent. Le roi chevauchait au milieu du peuple des Tout-Petits. La reine à ses côtés, portait Coraline dans ses bras,

et Chaton se tenait bien droit sur le pommeau de la selle. Et ils se rendirent chez la Femme Très Sage, dans sa maison perchée au sommet de la colline verte.

Ils lui soumirent la devinette qui les tourmentait tant. La Femme Très Sage resta silencieuse un long moment, puis elle dit à la reine :

• Bien que votre chagrin soit grand, plus grand encore est le chagrin de celle qui enfanta Coraline.

C’est pourquoi l’enfant doit retourner chez sa mère.

Une larme coula sur la joue de la reine et scintilla à la lumière de la lune.

• Ne pleurez pas, ajouta la Femme Très Sage, car tout n’est pas perdu.

Puis elle se tourna vers le roi et lui dit :

• Sans son petit chat, l’enfant sera trop triste. C’est pourquoi Chaton doit rester avec la fillette.

Il possédait le pouvoir de garder Chaton, mais le roi inclina la tête.

• Nous avons souhaité nous soumettre à votre jugement, Femme Très Sage, dit-il, et nous obéirons.

• Vous agissez noblement, Seigneur, déclara la Femme Très Sage, mais tout n’est pas perdu. Puisque vous abandonnez tout pouvoir sur eux,

chaque année Coraline et Chaton viendront vous rendre visite lorsque les nuits sont les plus longues. Et puisqu’ils ne sont pas liés par quelque pouvoir magique, ils retourneront vivre à la ferme, dès que les premiers chatons danseront au vent.



À ces mots, la joie s’empara de la reine. La séparation l’attristait, mais elle savait qu’elle reverrait l’enfant. Elle repartit en compagnie du roi

dans la nuit éclairée par les étoiles, et le peuple des Tout-Petits regagna le royaume qui se cache sous la colline verte.

Alors la Femme Très Sage installa Chaton sur son épaule et ramena Coraline à ses parents. Lorsque le fermier et sa femme les aperçurent qui descendaient la colline, ils se précipitèrent pour les prendre dans leurs bras.



Après avoir entendu le jugement de la Femme Très Sage, ils l’acceptèrent et se montrèrent généreux dans leur bonheur.

Depuis ce jour, les fermiers vivent heureux avec Coraline, Chaton, et le peuple des Tout-Petits.

Leur ferme n’a jamais été aussi belle sur la colline verte et ronde.



Antonia Barber et P. J. Lynch
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Contes  - Page 3 EmptySujet: Re: Contes Sam 13 Oct - 17:14Message n°82sur la page N°1

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